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Certificats d’Economies d’Energie et industrie pétrolière : une nouvelle forme de « French Paradox » ?

Les Certificats d’Economie d’Energie (CEE) sont une disposition légale selon laquelle tous les fournisseurs et distributeurs d’énergie – les Obligés – sont tenus de financer des opérations visant à réduire la consommation de cette même énergie. L’obligation globale est répartie entre ces obligés au prorata de leurs ventes d’énergie aux consommateurs finaux.

Les objectifs de cette loi, renouvelés à l’occasion de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) publiée au Journal Officiel du 18 août 2015, sont très clairs : réduire la consommation d’énergie à l’échelon national et permettre à la France d’atteindre ses engagements en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

Mais ce système, sans conteste vertueux, abrite un paradoxe majeur puisqu’il contraint des industriels à mener des actions qui vont – à terme – réduire leur chiffre d’affaires. Peut-on alors demander à ces acteurs privés de scier la branche sur laquelle ils sont assis ?

1 – Un dispositif cher et contraignant

Sans refaire ici l’historique des 3 périodes précédentes, on peut néanmoins dire que le contexte des CEE est clairement haussier, tant du point de vue du volume d’obligation (1600 TWh cumac (1)) que du prix des CEE (plus de 9€/MWhc sur le marché spot en mai 2019).

Ramené aux niveaux d’obligations « individuels » des principaux obligés que sont TOTAL et EDF, cela représente des montants de plus de 3 milliards d’euros sur la 4ième période. Et ce chiffre, évalué pour le 10ième acteur français, dépasse les 150 millions d’euros. La note est donc salée pour les fournisseurs d’énergie, et de ce fait pour les consommateurs finaux, puisque cet « impôt » est – au même titre que la TICPE ou l’éco-taxe par exemple – réintégré dans les prix de vente de l’énergie au consommateur final.

Mais le prix des CEE n’est pas la seule contrainte du dispositif. En effet le marché des certificats d’économies d’énergie, artificiellement maintenu peu liquide, est tendu et impose aux énergéticiens de mettre en œuvre de réelles stratégies de diversification de leurs sources de CEE.

Pour ces raisons, on comprendra aisément que les CEE sont perçus très négativement par tous les professionnels du secteur. Et pourtant, la maturité du dispositif et les velléités du gouvernement de le prolonger – a priori – de deux périodes de 3 ans, imposent probablement un changement de paradigme.

2 – Les CEE comme outil de compétitivité

Compte-tenu des éléments susvisés, l’association des mots « CEE » et « Compétitivité » semble contre-nature. Imaginons néanmoins l’exemple suivant :

  • Un obligé ‘Carburant’ qui ne s’est pas doté d’une organisation ad hoc de ‘gestion’ de ses CEE est contraint de s’alimenter sur le marché Spot. S’il parvient à y écouler l’intégralité de son obligation, il paiera 9,08€/MWhc (2), dans le cas contraire il devra régler la pénalité aujourd’hui fixée à 15€/MWhc. En considérant de ce fait un coût moyen d’acquisition à 10€/MWhc (9,08€ plus une partie de pénalité), l’impact direct sur le prix à la pompe est évalué à 6,9 centimes par Litre (TTC).
  • Pour un autre obligé ‘Carburant’ qui aurait diversifié ses canaux d’acquisition et se serait doté de structures internes dédiées, on peut estimer que les CEE puissent être obtenus en moyenne à 7€/MWhc. L’impact sur le prix à la pompe est alors limité à 4,8 centimes par Litre (TTC).

En conclusion, si tous les autres facteurs de compétitivité étaient équivalents par ailleurs, la simple façon d’aborder stratégiquement les CEE (Achat Spot vs Gestion internalisée) induit mécaniquement un écart de plus de 2 centimes du Litre. L’un ajoute 4,8 centimes par Litre pour couvrir ses coûts tandis que l’autre affiche – sur le même sujet – un surcoût de 43,8% pour un montant de 6,9 centimes par Litre.

3 – Les CEE comme facilitateurs et accélérateurs de Business

Enfin, au-delà de la différence de compétitivité entre deux obligés concurrents, les CEE peuvent avoir un effet direct sur le chiffre d’affaires. Deux cas sont possibles :

  • Soit l’obligé possède au sein de sa propre structure capitalistique un installateur (Chaudière, Froid, Air Comprimé, etc.)  pourvoyeur de CEE. En intégrant à ses offres le montant des CEE, financés par l’obligé, l’installateur de froid, par exemple, est en mesure de proposer ses services à moindre coût pour le client final et de ce fait, d’accroître mécaniquement ses ventes. L’obligé gère ainsi son obligation et développe son chiffre d’affaires.
  • Soit l’obligé est fournisseur d’une structure externe, elle-même pourvoyeuse de CEE. En finançant les opérations de ses propres clients, l’obligé dope leur activité ce qui implique – là encore mécaniquement – un besoin accru en matières premières. L’obligé accroît donc ses ventes en jouant un rôle de « facilitateur business » pour son propre client.

En conclusion il y a deux types de réponse face au sujet des CEE : a) considérer que ce n’est qu’un fardeau financier lourd à porter ou b) envisager les réelles possibilités de disruption offertes. DEKKHA Consulting accompagne la stratégie à la mise en œuvre ceux qui adoptent la seconde option.

     Nicolas Barrois – Directeur Associé

(1 – L’allongement de la 4ième période d’une année porte désormais le volume total à 2133 TWhc)

(2 – Source EMMY / PowerNext : 9,08 € / MWhc en mai 2019)

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