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L’agriculture est-elle l’avenir de la Transition Energétique ?

La COP25 de Madrid vient de se terminer et le sujet de la transition énergétique est plus que jamais d’actualité. Mais en cette fin d’année 2019, deux constats importants s’imposent à nous : 1 er constat : Lors de la journée Technique de l’ATEE du 12 décembre dernier à Paris, l’ADEME a présenté sa vision des gisements de Certificats d’Economies d’Energie (CEE) sur la 5ième période. Les scénarios médians faisaient état d’un total de 1501 TWhc dont seulement 27 TWhc dans le secteur de l’Agriculture (1,8%). 2 ième constat : Le terme « agribashing » a fait son apparition dans le débat public et les maux dont on accuse les agriculteurs aujourd’hui sont nombreux : pollution des sols, déforestation, impact sur le réchauffement climatique ou sur les inondations, etc. Mais a-t-on raison de méconsidérer à ce point l’impact potentiellement positif de l’agriculture sur la Transition Energétique ? Et ce secteur ne représenterait-il pas au contraire l’avenir pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 ?

1 – Le secteur agricole, actuel parent pauvre du dispositif des CEE, dispose d’un potentiel sous-estimé

22 fiches CEE sont référencées dans « Agriculture », ce qui est un nombre élevé compte-tenu de la faible part relative du secteur dans les volumes de Certificats d’Economie d’Energies produits. Néanmoins en regardant de plus près, l’étude de l’ADEME présentée à la journée Technique ATEE du 12 décembre fait état de 98,3% de ces volumes concentrés sur 6 fiches seulement, et probablement de l’ordre de 88% sur la seule AGRI-TH-104 ( 1 ). Concrètement donc, en 2018 les CEE en Agriculture se limitent à des opérations de « Système de récupération de chaleur sur groupe de production de froid hors tanks à lait ».

Les fiches « Agriculture » actuelles semblent donc sous-exploitées et cela est probablement lié à deux facteurs :

– En dehors de la fiche d’opération standardisée AGRI-TH-104, qui peut s’appliquer à de nombreux types d’exploitations agricoles, la majeure partie des autres fiches ne concerne que les serres horticoles ou maraîchères.

– D’autre part les opérations standardisées actuelles impliquent pour beaucoup l’installation de matériel supplémentaire (chaudière à condensation, déshumidificateur thermodynamique, etc.). Cela représente donc des investissements conséquents, même financés en partie par les CEE, alors qu’un acteur de la filière rapportait encore récemment que « les économies d’énergie ne sont pas nécessairement dans le matériel, mais plus dans les activités de monitoring et de pilotage ».

Concrètement de nouvelles opérations standardisées doivent être déposées, et notamment autour de l’installation de systèmes de contrôles des exploitations agricoles. Aujourd’hui ce sujet est trop peu adressé et des gisements notables de CEE y reposent probablement. Et il est également nécessaire que l’origination des opérations standardisées CEE soit menée hors des centres urbains, où se nichent copropriétés et maison individuelles à isoler via Coup de Pouce, pour exploiter le potentiel du secteur Agricole au-delà des 1,8% envisagés par l’ADEME. La consommation d’énergie du segment ‘Agriculture’ se situant – selon les années – autour de 2,8% de la consommation totale en France, cela laisse potentiellement une marge de progression d’au moins 15 TWhc.

2 – Sans agriculture, pas de biocarburants de 2nde génération

Lorsque l’on évoque les biocarburants aujourd’hui on parle principalement de Bioéthanol & de Biodiesel. Ceux que l’on nomme « conventionnels » ou de 1ère génération sont produits à partir de matières premières telles que l’huile de palme, l’huile de colza ou la betterave sucrière. S’ils sont largement décriés, notamment pour leur action indirecte sur la déforestation et parce qu’ils occupent des terres qui pourraient être utilisées pour produire des denrées alimentaires, il faut savoir que ce type de biocarburant est en fin de vie (2). Les directives européennes actuelles, et notamment RED II, intègrent une limitation sur ces produits et s’efforcent de promouvoir les biocarburants avancés, dits de 2nde ou 3ième génération.

Les biocarburants de 3ième générations sont issus d’algues ou de micro-organismes. La technologie est prometteuse mais encore immature notamment pour une application à l’échelle industrielle. La 1ère génération est obsolète, le 3ième génération encore en développement, l’avenir immédiat des biocarburants est donc représenté par la 2nde génération. Ces produits sont tirés de résidus lignocellulosiques ainsi que d’autres sous-produits peu valorisés issus de l’agriculture. Pour les produire il ne s’agit plus alors de cultiver des surfaces agricoles, mais bien d’utiliser des résidus peu exploités à présent.

Le secteur agricole a donc un rôle important à jouer dans la décarbonation des activités de transport, par la valorisation de ses déchets pour la production de biocarburants de deuxième génération.

3 – La mise en œuvre du CEPP (Certificats d’Economie des Produits Phytopharmaceutiques) va enclencher une dynamique vertueuse pour la réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.

Certes le dispositif des Certificats d’Economie des Produits Phytopharmaceutiques ou CEPP n’est pas en lien avec la Transition Energétique. Néanmoins les CEPP sont calqués sur le modèle des CEE : des obligés (distributeurs de produits phytopharmaceutiques) doivent inciter des bénéficiaires à mettre en œuvre des actions d’optimisations, identifiées par des opérations standardisées – 60 à ce jour – , afin de réduire la consommation des produits dans le secteur agricole. On ne parle pas ici d’énergie, ni en termes de réduction de la consommation, ni en termes de transition vers le renouvelable. Néanmoins – et bien que ce dispositif ne voie réellement le jour qu’au début de l’année 2020 – le CEPP s’inscrit dans une mouvance verte globale et doit permettre de répondre en partie aux détracteurs du secteur Agricole

Conclusion

Le potentiel d’économies d’énergie en France ne se limite pas à Coup de Pouce ( 3 ). Certes ce dispositif est important et les volumes d’économies d’énergie (hors bonification) engagés depuis janvier 2019 atteignent les 71 TWhc, mais ce marché est aujourd’hui très concurrentiel. Sans vouloir créer une opposition dans les actions, nous estimons plutôt que d’autres pistes sont à investiguer. Qu’il s’agisse d’installations agricoles qui intègrent de réels processus industriels (viticulture) ou de modalités de contrôles / monitoring (dans les activités sous-serres par exemple) les gisements CEE semblent encore sous exploités aujourd’hui. S’il on ajoute l’importance du secteur dans la production de biocarburants 2nde génération et la volonté affichée de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires on peut constater que l’Agriculture entend jouer un rôle vertueux pour le défi climatique en cours. DEKKHA Consulting intervient sur l’ensemble de ces sujets et dispose d’une expertise sectorielle & méthodologique. De la stratégie à la mise en œuvre opérationnelle nous sommes en mesure de vous accompagner pour faire des opportunités d’aujourd’hui les perspectives business de demain

(1) – AGRI-TH-104 « Système de récupération de chaleur sur groupe de production de froid hors tanks à lait »

(2) Les biocarburants de 1ère génération ont déjà démontré les limites de leur contribution potentielle à la transition énergétique et sont visés par des texte réglementaires pour être remplacés par les 2ième et 3ième générations.

(3) Coup de Pouce – Système de survalorisation de certaines opérations standardisées visant des travaux d’isolation ou de remplacement de systèmes de chauffage.

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